Le Dhar Néma à la fin du Néolithique : gérer une péjoration climatique au Sahara méridional.

  • Author: Alain Person, Chloé Albaret, Sylvie Amblard-Pison, Hélène Jousse, Thibault Vallette et Sidya Ould Mhaiham
  • Topic: 2000 to 10,000 BP,Environmental archaeology,Lithic studies
  • Country: Mauritania
  • Related Congress: 13th Congress, Dakar

Les falaises de l’arc des Dhars en Mauritanie Sud-Orientale constituent un géoécosystème qui a enregistré dans l’évolution de son régime hydrologique les modifications climatiques globales depuis le dernier maximum glaciaire. La redistribution des eaux accumulées au cours du grand humide de l’Holocène ancien, à partir de sources et de lac hydro-éoliens alimentés par des nappes phréatiques fossiles, a permis aux populations néolithiques de la seconde moitié de l’Holocène d’y trouver refuge lors de la péjoration climatique qui va conduire au milieu saharien actuel. Elles ont installé leurs habitats et leurs sépultures sur les dunes recouvrant les colluvions de pentes du pied des reliefs et sur le plateau au sommet des escarpements. Les derniers travaux de terrain réalisés dans le baten à quelques kilomètres des falaises ont montré que des hommes se sont installés à la même époque sur d’autres unités géomorphologiques, telles que des inselbergs doléritiques ou des massifs dunaires fixés. En fonction de la nature de ces différentes unités, les vestiges semblent nous montrer une exploitation différentielle de l’espace. Ainsi, la zone de dunes où sont conservés des indices de fonds de mare présente de fortes concentrations d’ossements de poissons. Associées à des vestiges céramiques et lithiques, ces restes attestent d’une exploitation des ressources halieutiques.

La fabrication de matériel lithique agricole (houes, sarcloirs) se localise sur les filons de dolérite mis en relief par l’érosion différentielle, où seuls des préformes d’outils gisent au sein des ateliers de taille. Les objets terminés se rencontrent quant à eux à la périphérie des grands sites d’occupation liés à la présence de cours d’eau. Autour du pointement doléritique de Tounfrin se répartissent zones d’habitats et vastes enclos aux murs bien appareillés. La forme particulière des affleurements naturels de dolérite en fait un lieu original. Les plus gros blocs des zones d’éboulis supportent des gravures rupestres présentant des personnages dont certains sont montés sur des bovidés. Au pied de l’affleurement, sept enclos aux murs tripartites de pierres (deux parements enfermant un blocage) ont été identifiés. Ils sont construits sur des zones qui semblent avoir été préalablement aménagées afin de bénéficier d’une surface la plus plane possible. Ils mesurent en moyenne 50 m de diamètre, mais le plus grand, isolé à l’ouest de l’inselberg atteint plus de 90 mètres. L’absence de vestiges liés à la vie quotidienne au sein des enclos, leur taille surdimensionnée, ainsi que leur caractère pérenne à proximité de zones d’habitats nous amènent à croire en une utilisation cultuelle de ce lieu exceptionnel. La péjoration climatique a conduit les hommes à se rassembler dans une région disposant encore d’une alimentation en eau grâce à l’appoint des nappes phréatiques fossiles. Ils n’ont pu y survivre qu’au prix d’un changement radical de mode de vie, en apprenant à gérer toutes les ressources du milieu naturel.


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